9 novembre 2012
Quelles sont les discriminations qui existent à l’embauche ? Interview Jacques Froissant par BeurFM / Qapa

les discriminations qui existent à l’embauche

Retranscription complète de l’interview donnée le mardi 6/11 sur BeurFM :

Quelles sont les discriminations qui existent à l’embauche ?

« Aujourd’hui il y a plus de 3 millions de chômeurs en France. Pendant la crise, il y a des personnes en difficulté mais il y aussi des personnes en plus grande difficulté encore : les jeunes, les seniors, les personnes en situation de handicap, les personnes des quartiers », Philippe Robichon, journaliste Beur FM. Quelles sont les discriminations qui existent à l’embauche ?

« Si l’on considère toutes les formes de discrimination sur le marché du travail, on se rend compte que cette population est largement majoritaire. Nous avons donc décidé d’aller plus loin que la semaine de soutien aux handicapés et lançons pendant un mois entier la lutte pour venir en aide à tous les discriminés», Stéphanie Delestre, fondatrice de Qapa.fr

Pendant tout le mois de novembre, Qapa et Beur FM se consacrent entièrement à la lutte contre toutes les formes de discrimination dans le domaine de l’emploi avec l’opération “Discriminons les cons”.

Aujourd’hui Jacques Froissant, co-fondateur du cabinet de recrutement Altaïde et membre de “A compétence égale”, nous explique quelles sont les discriminations qui existent à l’embauche.

– Altaide fait partie d’A Compétence Egale. A quoi sert cette association ?

Créée en 2006, l’association A Competence Egale regroupe aujourd’hui 60 cabinets de recrutements représentant plus de 1000 consultants en recrutement. Elle a pour vocation de :
– favoriser l’égalité des chances des candidats dans les process de recrutement
– agir auprès des entreprises clients des cabinets membres pour prévenir les discriminations
– être force de propositions auprès des cabinets de recrutement non membres, du grand public, des médias et des pouvoirs publics
– Former les consultants à des pratiques recrutement non discriminantes

– Qu’est-ce-qu’on sait des pratiques de discrimination aujourd’hui ?

C’est un sujet qui est de mieux en mieux traité et suivi. Les média en parlent régulièrement et Le Défenseur des Droits (anciennement La Halde) récolte les plaintes et remonte les statistiques. Depuis plusieurs années ces organismes proposent des campagnes régulières de sensibilisation.
Du côté des entreprises, beaucoup de travail a été fait aussi avec des expérimentations tel que le CV anonyme même si l’on sait maintenant que ce n’est pas la solution miracle. La solution la plus efficace reste la formation des recruteurs et managers pour améliorer leurs pratiques de recrutement.

– Comment peut-on savoir qu’on a été victime de discrimination à l’embauche ?

C’est très difficile à prouver, à moins que le recruteur ait ouvertement dit ou écrit des points discriminants du type : “vous habitez trop loin” ou “vous êtes trop jeune pour le poste”. Si c’est le cas n’hésitez pas à dénoncer ces discriminations.
De plus, il faut faire attention au fait de s’auto-discriminer soit-même ou de se réfugier derrière ce type d’excuse. En effet il peut être facile de se dire discriminé alors que l’on a juste pas été à la hauteur en entretien de recrutement. Il s’agit avant tout de faire son propre bilan à la fin d’un processus d’embauche qui n’a pas marché et de se poser les bonnes questions. Par exemple en tant que recruteur, je vois énormément de candidats arrivant non préparé à un entretien. Si vous êtes potentiellement discriminables par un des critères, vous devez redoubler de professionalisme dans la gestion de vos rendez-vous emplois.

– Concrètement qu’est-ce-qui relève de la discrimination ?

La discrimination c’est écarter des candidats d’un process de recrutement pour des critères autres (âge, sexe, origine…) que les compétences demandées pour un poste.

– Avez-vous vu des CV écartés sur des critères discriminants ?

Oui bien sûr, et souvent sur des critères basiques comme la localisation. La discrimination se fait souvent de façon inconsciente comme par exemple : “je ne souhaite pas recruter cette secrétaire parce-qu’elle habite en banlieue et que le poste que je propose est basé à Paris” or cela est discriminant car il ne s’agit pas des compétences de la candidate.
C’est la raison pour laquelle je recommande de ne pas mettre son âge et son adresse postale sur un CV. On mettait son adresse postale quand le recruteur ne pouvait vous contacter que par la poste, aujourd’hui le recruteur a juste besoin d’un mail ou d’un numéro de téléphone portable pour contacter un candidat.

– Quel est le top des discriminations à l’embauche ?

1/ le sexe du candidat
2/ son âge
3/ son origine

– Une femme a-t-elle moins de chance de décrocher un emploi qu’un homme ?

Oui, très clairement car certains recruteurs peuvent penser qu’une femme a plus de chances d’être absente pour s’occuper des enfants malades, ou alors de tomber enceinte si elle est jeune !

– Et à quel âge est-on “vieux” aujourd’hui sur le marché du travail ?

50 ans est une vraie barrière. Nous conseillons fortement d’adapter son CV et d’adopter des techniques de recherche d’emploi plus pro-active pour être rapidement en contact physique avec des recruteurs. 80% de la discrimination potentielle disparaît en vis à vis d’un recruteur versus le tri sur CV. Dans le livre “Guerilla Marketing pour trouver un emploi” aux Ed. Diateino, j’y explique largement les recettes à adopter pour une recherche efficace.

– Quelles sont les autres discriminations à l’embauche ?

4/ la situation de famille
5/ le fait d’être enceinte
6/ le physique : le fait d’être gros ou maladif par exemple
7/ le handicap
8/ la religion
9/ les activités syndicales
10/ les orientations sexuelles, politiques
11/ le nom de famille

– Comment peut-on se battre contre les discriminations à l’embauche quand on recherche un emploi ?

Il faut garder à l’esprit que 80% des discriminations se font sur un CV et 20% pendant l’entretien. Ce que je veux dire par là, c’est que lorsque vous avez décroché un entretien le recruteur est moins sujet à des pensées discriminatoires que juste avec la vue d’un CV.
Par conséquent, il faut absolument rendre son CV le moins propice aux discriminations. Par exemple : ne pas mettre son âge, ne pas mettre son adresse postale, pour un senior ne mettre que ses 15 dernières années d’expérience. Vous mettez ainsi le recruteur en position de lire votre CV sans s’arrêter à des détails qui ne sont pas obligatoires sur un CV. Il se concentre plus sur vos compétences et vos chances augmentent.

– Mais pourquoi 80% de la discrimination tombent avec l’entretien ?

Parce-que les recruteurs ont des à-priori dans la tête et que lorsque vous poussez la porte de son bureau il est obligé de s’intéresser à vous !
Par conséquent, il faut tout faire pour passer l’épreuve du CV en mettant en avant ses compétences et en retirant des éléments sujets à discrimination et décrocher l’entretien.
Mais attention, comme nous le disions plus haut, beaucoup de candidats arrivent en entretien mal préparés. Ils pensent que le plus dur est fait alors que rien n’est encore gagné ! Le risque en étant mal préparé c’est de finir par rater l’entretien alors que l’on avait de bonnes chances.

– Qu’est ce qui vous incite aujourd’hui à lutter contre les discriminations ?

Ce qui me plait dans mon métier, c’est de rendre service aux gens. Lutter contre les discriminations, c’était donc une évidence pour moi. Favoriser l’égalité des chances dans les process de recrutement, a toujours été dans les gènes d’Altaide, le cabinet de recrutement que je dirige. Evoluant dans les métiers du web, on est plus protégé de la discrimination car on évolue dans des métiers pénuriques. Les recruteurs recherchant des compétences rares, prennent l’habitude d’être très ouvert en terme de profil, d’origine, de sexe,etc. Il faut donc étendre ces bonnes pratiques à tous les secteurs, à toutes les entreprises.

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